Prise de décision partagée dans la rencontre professionnel de santé – patient/e

Contexte

Depuis quelques années, l’information des patients et la participation aux décisions, en matière de soins de santé par le biais, notamment, de la prise de décision partagée (PDP, en anglais Shared Decision Making) sont reconnues dans le monde entier comme un élément important de la qualité des systèmes de santé1.2.3.4.5. Or, les préférences individuelles en matière de traitements et de dépistage sont encore mal et insuffisamment prises en compte par la majorité des professionnels de santé.

Le développement d’une offre de services de santé qui respecte pleinement les préférences des usagers est un enjeu de santé publique, car une meilleure prise en compte de ces préférences devrait conduire à une plus grande satisfaction à l’égard du système de santé, de meilleurs résultats en matière de santé, une meilleure qualité de vie des patients, une amélioration des connaissances et de la communication entre le médecin et le patient, une perception plus précise des risques par le patient et enfin, moins d’anxiété et de regret décisionnel6. Ces constats ont conduit au « changement de paradigme », proclamé au milieu des années 1990 par plusieurs revues internationales, promouvant la prise de décision partagée dans la rencontre médecin-patient comme nouvelle approche de communication7.8.

Objectifs

  1. Promouvoir la culture et l’implantation de la prise de décision partagée dans un nombre croissant de domaines de la cancérologie (tant dans les activités de diagnostic que de traitement ou de prévention), en favorisant :
    • La mise en place d’un processus décisionnel bilatéral, reconnaissant à la fois le savoir expérientiel et les préférences des patients, et les connaissances et l’expérience des professionnels de santé ;
    • L’utilisation d’outils d’information et d’aide à la décision en support du processus de prise de décision entre professionnel de santé/équipe soignante et patient/proches.

Cette promotion passe par des actions de formation et d’enseignement auprès :

    • Des institutions membres d’Unicancer
    • Des services et professionnels de santé demandeurs de cette mise en place dans leurs spécialités.

Promouvoir la recherche autour de la PDP en soutenant le développement de projets d’implantation et d’évaluation de la PDP, mais aussi la création d’outils de PDP, soit par la traduction et l’adaptation d’outils étrangers existants, soit par la création d’outils innovants9.

L’appui des experts du groupe collaboratif FREeDOM10 (collaboration francophone sur la prise de décision partagée) est proposé, tant dans les domaines de l’enseignement et de la recherche que de la communication auprès du grand public.

Éléments clés

La promotion de la PDP (culture, processus, outils), au sein des CLCC, dépend d’un double mécanisme qui s’inscrit dans une perspective systémique :

  • Promotion « transversale », par domaine et spécialité, selon une diffusion et une acculturation sollicitée par les professionnels de santé et les services en lien avec les patients partenaires.
  • Promotion « verticale », soutenue et portée par l’institution qui incite, dans le cadre d’un projet d’établissement par exemple, ses équipes, en lien avec les patients partenaires, à la mise en place d’une culture et d’une pratique de la PDP.

Bases éthiques, réglementaires et légales

En France, la promotion de la prise de décision partagée s’inscrit dans le prolongement d’une évolution initiée, après les États Généraux de la Santé en 1998, dès la loi du 4 mars 2002, relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé11. Outre que celle-ci introduit, dans le code de la santé publique (L. 1111-2), le droit à toute personne « d’être informée sur son état de santé », l’article L. 1111-4 précise que « toute personne prend, avec le professionnel de santé et compte-tenu des informations et des préconisations qu’il lui fournit, les décisions concernant sa santé » ; « aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne.» . Au-delà de l’accent mis, dès cette formule sur le consentement obligatoire, sur le droit au refus de la part du patient (« Toute personne a le droit de refuser ou de ne pas recevoir un traitement »), c’est bien l’implication active de l’usager dans la prise de décision concernant sa santé qui est soulignée et cette décision s’effectue avec le professionnel de santé. Si l’usager reste, de facto, le décideur en dernière instance (il demeure libre d’accepter ou non la proposition de traitement faite, et de l’appliquer ou non), le fondement est ici posé d’un nécessaire partage du processus décisionnel entre la personne et le professionnel de santé.

L’évolution sociétale, après avoir présidé à la genèse de la loi du 4 mars 2002, n’a fait qu’en confirmer ensuite les termes et la philosophie fondatrice. Car à côté des principes éthiques cardinaux de bienfaisance et de non-malfaisance, le principe d’autonomie de la personne s’inscrit de façon croissante, et aujourd’hui prééminente, dans les aspirations des usagers du système de santé. La prise de décision partagée est le fruit, avant tout culturel, de cette évolution. La prise de conscience de ce fondamental de l’éthique médicale transcende donc « la lettre » législative : elle ancre la Loi dans le respect des principes les plus absolus de l’éthique.

Les recommandations de la Haute Autorité de Santé en 2013 et 2018, inspirées de l’expérience et de la recherche anglo-saxonnes, ainsi que la Stratégie Nationale de Santé 2018-2022, soutiennent fortement la co-décision entre les usagers de la santé et les professionnels de santé. La PDP est non seulement légitimée par des textes législatifs fondateurs et des recommandations officielles, mais elle constitue aussi et surtout un levier de l’éthique médicale, essentiel et profitable à la fois aux usagers et aux professionnels.

Panorama

La PDP est définie par 3 étapes caractéristiques12.13

    1. L’échange d’informations est bilatéral ;
    2. La caractéristique déterminante de la délibération est sa nature interactive (c’est à dire entre le médecin/équipe soignante et le patient et ses proches éventuels) ;
    3. Les deux parties s’efforcent de parvenir à un accord et s’impliquent dans la prise de décision finale. Ainsi, la participation du patient ET du médecin à chaque étape du processus décisionnel est-elle essentielle.

Grâce à cet échange fondamental14, les professionnels de santé comprennent mieux les implications, spécifiques à chaque patient, de leurs préférences. C’est aussi cette compréhension relationnelle qui aide à reconnaître les aspects potentiellement contraignants du système de santé pour les patients. Une véritable relation bilatérale peut ainsi être réalisée, respectueuse de l’identité du patient, de ses préférences, de son projet de vie, et lui permettant de développer et d’exercer ses compétences d’autonomie dans la rencontre médecin-patient, mais aussi au-delà.

En pratique

Les différentes étapes de la PDP sont les suivantes15:

  1. Définir la situation

2. Identifier/dire qu’une décision est à prendre

3. Présenter les options de traitements/prise en charge

4. Discuter les bénéfices et risques potentiels

5. Identifier les préférences du patient

6. S’assurer de la bonne compréhension du patient

7. Prendre une décision/prévoir les étapes suivantes

Le partage de la décision est souhaité et promu, il n’est en aucun cas imposé au patient, qui peut choisir de laisser au professionnel la charge de la décision. Les 7 étapes de la prise de décision consistent en un processus d’échanges, qu’appuieront idéalement des outils d’information et d’aide à la décision16

Bibliographie

  1. Institute of Medicine (US) Committee on Quality of Health Care in America. Crossing the Quality Chasm: A New Health System for the 21st Century. Washington (DC): National Academies Press (US); 2001. PMID: 25057539.
  2. United Kingdom National Health Service Shared Decision-Making. 2020.
  3. Australian Commission on Safety and Quality in Health Care, Shared Decision-Making, 2015.
  4. Haute Autorité de Santé, Patients et Professionnels : Décider ensemble. 2013. [1] Ministère de la santé et des solidarités. Stratégie Nationale de Santé 2018-2022.
  5. Ministère de la santé et des solidarités. Stratégie Nationale de Santé 2018-2022.
  6. Légaré F, Ratté S, Stacey D, Kryworuchko J, Gravel K, Graham ID, Turcotte S. Interventions for improving the adoption of shared decision making by healthcare professionals. Cochrane Database Syst Rev. 2010 May12;(5):CD006732. doi: 10.1002/14651858.CD006732.pub2. Update in: Cochrane Database Syst Rev. 2014;9:CD006732. PMID: 20464744.
  7. Bravo P, Härter M, McCaffery K, Giguère A, Hahlweg P, Elwyn G. Editorial: 20 years after the start of international Shared Decision-Making activities: Is it time to celebrate? Probably… . Z Evid Fortbild Qual Gesundhwes. 2022 Jun;171:1-4. doi: 10.1016/j.zefq.2022.05.009. Epub 2022 May 31. PMID: 35662496.
  8. Moumjid N, Durand MA, Carretier J, Charuel E, Daumer J, Haesebaert J, Hild S, Mancini J, Marsico G, Rat C, Zerbib Y, Vincent YM, Blot F. Implementation of shared decision-making and patient-centered care in France: Towards a wider uptake in 2022. Z Evid Fortbild Qual Gesundhwes. 2022 Jun;171:42-48. doi: 10.1016/j.zefq.2022.03.001. Epub 2022 May 21. PMID: 35606309.
  9. Durand MA, Alam S, Grande SW, Elwyn G. ‘Much clearer with pictures’: using community-based participatory research to design and test a Picture Option Grid for underserved patients with breast cancer. BMJ Open. 2016 Feb 2;6(2):e010008. doi: 10.1136/bmjopen-2015-010008. PMID: 26839014; PMCID: PMC4746463.
  10. Loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000215460
  11. Charles C, Gafni A, Whelan T. Shared decision-making in the medical encounter: what does it mean? (or it takes at least two to tango). Soc Sci Med 1997 Mar;44(5):681-92.
  12. Charles C, Gafni A, Whelan T. Decision-making in the physician-patient encounter: revisiting the shared treatment decision-making model. Soc Sci Med 1999 Sep;49(5):651-61.
  13. Entwistle VA, Carter SM, Cribb A, McCaffery K. Supporting Patient Autonomy: The Importance of Clinician-patient Relationships. J Gen Intern Med. 2010 Jul; 25(7): 741–745.
  14. Makoul G, Clayman ML. An integrative model of shared decision making in medical encounters. Patient Educ Couns. 2006 Mar;60(3):301-12. doi: 10.1016/j.pec.2005.06.010. Epub 2005 Jul 26. PMID: 16051459.
  15. Exemples : sites de l’OHRI, Canada (https://decisionaid.ohri.ca/francais/repertoire.html) et le site de la Collaboration francophone FREeDOM ( www.freedom-francophone.fr).

Terminologie du partenariat patient

Objectifs

L’engagement des patients et aidants est un enjeu majeur. Pour autant, en France, aucune terminologie de ce partenariat n’est reconnue par tous.

La littérature internationale et nationale offre différentes terminologies et définitions avec une multitude de termes pour traduire l’engagement des patients, avec des sous-catégories parfois très fines, ce qui en complexifie la compréhension.

A partir de la revue de cette littérature, cette fiche repère propose une terminologie adaptée à l’engagement des patients des Centres de Lutte Contre le Cancer. Elle se veut simple et compréhensible pour permettre une appropriation aisée par l’ensemble des acteurs engagés dans le déploiement de ce partenariat, que sont les gouvernances, les équipes soignantes et les patients.

Éléments clés

Le patient, en plus de ses compétences acquises en dehors de la maladie, acquiert des connaissances liées à sa maladie, à son parcours de soins, à ses traitements, et au « vivre avec ».

Ce terme « patient » comprend les proches-aidants qui acquièrent également un savoir « expérientiel », issu de l’accompagnement de la personne dans son parcours et sa vie avec la maladie. Il n’est pas retenu le terme « usagers » qui fait référence à une utilisation d’un service (ici, ce serait sanitaire).

Le « croisement de regards » professionnels hospitaliers – patients amène une mise en perspective sous un autre angle qui complète le savoir hospitalier, médical et scientifique.

Cette fiche considère le patient partenaire au sens collectif, où il contribue pour autrui, auprès des professionnels hospitaliers et/ou d’autres patients.

Il est fréquemment utilisé le terme de « patient-expert », en référence à une expertise profane, c’est à dire non scientifique. Le choix a été fait de ne pas retenir ce terme mais celui de « patient partenaire » avec ses différentes déclinaisons/dimensions.

Le partenariat représente un enjeu clé voulu par les patients et des professionnels hospitaliers (soignants et non-soignants) pour améliorer la qualité, la pertinence et l’efficience de la prise en charge, des parcours, et de la vie avec la maladie dans un contexte d’évolution sociétale et sanitaire.

Préambule

Pour que cette terminologie soit pragmatique et adaptée à nos pratiques, chaque terme est décrit en quelques lignes synthétiques avec, quand appropriée, une indication de « prérequis » pour un partenariat avec le patient, ainsi que des exemples d’ores et déjà expérimentés ou en routine dans les Centres de Lutte Contre le Cancer.

Il s’étend sur le champ des 3 missions de Centres de Lutte Contre le Cancer que sont :

  • Le soin ;
  • La recherche ;
  • L’enseignement.

Panorama

Les types de partenariat-patient…

Repère 1 : Patient ressource

Co-construit, en collaboration avec l’ensemble des professionnels de l’hôpital, des parcours de soins, des projets ou programmes de recherche, des organisations, des aménagements architecturaux, de l’information patients-aidants…

Repère 2 : Patient pair-aidant

Accompagne d’autres patients dans leurs parcours de soins grâce à son vécu, son savoir expérientiel.

Repère 3 : Patient formateur

Élabore, avec les professionnels de santé, des programmes d’enseignement, intervient dans la formation des professionnels et dans l’éducation thérapeutique des patients ;

Peut également former d’autres patients partenaires.

Repère 4 : Patient évaluateur

Participe à l’amélioration de la qualité des soins et à la gestion des risques au travers de sa participation à différentes évaluations et audits.

Repère 5 : Patient coordonnateur

Coordonne et contribue aux projets en lien avec le partenariat patient ainsi qu’à la diffusion de la culture collaborative.

Développe et anime un réseau de patients.

En pratique

REPÈRE 1 : Patient ressource

Il co-construit, en collaboration avec l’ensemble des professionnels de l’hôpital, des parcours de soins, des projets ou programmes de recherche, des organisations, des aménagements architecturaux, de l’information patients-aidants…

Prérequis :

  • Être dans une posture constructive ;
  • Souhaiter s’investir pour autrui ;
  • Avoir pris de la distance par rapport à sa maladie.

Exemples :

Co-écrire/co-relire des documents destinés aux patients pour les rendre plus compréhensibles et plus adaptés à l’ensemble des usagers.

Participer à des groupes de travail ou projets de recherche pour apporter son regard et son expérience sur :

    • L’aménagement architectural (signalétique interne et externe de l’établissement, espaces d’attentes, chambres…)
    • L’organisation des soins (fluidification des parcours de prise en charge, coordination ville-hôpital…)
    • La digitalisation de l’hôpital et e-santé (portail patient, outils interactifs et éducatifs, serious game…)
    • Recherche (co-écriture de protocoles et résultats, relecture des plaquettes d’information spécifique recherche, formulaires de consentement…)

Être partie prenante de la gouvernance :

    • Participer à la définition des axes stratégiques de l’établissement et à leur mise en œuvre dans une instance mixte patients, associations, Représentants des usagers et professionnels hospitaliers, dont la gouvernance.

REPÈRE 2 : Patient pair-aidant

Il accompagne d’autres patients dans leurs parcours de soins grâce à son vécu et son savoir expérientiel. Il facilite le cheminement de leur réflexion quant à l’acceptation des soins et de leurs conséquences éventuelles.

Prérequis :

  • Être dans une posture constructive ;
  • Souhaiter s’investir pour autrui ;
  • Avoir pris de la distance par rapport à sa maladie ;
  • Être formé à l’accompagnement.

Exemples :

  • Consultations en binôme avec le médecin et/ou l’infirmier (patient témoin) ;
  • Témoignage/partage d’expérience lors de groupes de paroles ;
  • Organisation de visites de l’établissement à destination des autres patients.

REPÈRE 3 : Patient formateur

Il élabore, avec les professionnels de santé, des programmes d’enseignement, intervient dans la formation des professionnels et dans l’éducation thérapeutique des patients. Il peut également former d’autres patients partenaires.

Prérequis :

  • Être dans une posture constructive ;
  • Souhaiter s’investir pour autrui ;
  • Avoir pris de la distance par rapport à sa maladie ;
  • Être à l’aise à l’oral, faire preuve de pédagogie et, si besoin, avoir des qualités rédactionnelles ;
  • Pour l’éducation thérapeutique, avoir suivi une formation certifiante.

Exemples :

  • Témoignages dans des sessions de formation, colloques, journées d’étude, pour les professionnels de santé (soignants, personnels administratifs) et les patients ;
  • Participation à des mises en situation lors de sessions de formation ;
  • Élaboration et animation/co-animation soignants/patients de sessions de formation à destination de professionnels de santé (soignants, personnels administratifs) et de patients-partenaires ;
  • Formateur dans des programmes et actions d’Éducation Thérapeutique Patient  ;
  • Formateur d’autres patients-partenaires.

REPÈRE 4 : Patient évaluateur

Il participe à l’amélioration de la qualité des soins et à la gestion des risques au travers de sa participation à différentes évaluations et audits.

Prérequis :

  • Être dans une posture constructive ;
  • Souhaiter s’investir pour autrui ;
  • Avoir pris de la distance par rapport à sa maladie ;
  • Être formé aux méthodes d’évaluations.

Exemples :

  • Intervieweur de patients dans la démarche patient traceur, réalisation de parcours traceurs ou traceurs ciblés selon les méthodes de la Haute Autorité de Santé ;
  • Co-auditeur interne ;
  • Co-analyste des événements indésirables et/ou participation aux Comités de Retour d’EXpérience (CREX) / Revue de Morbidité et Mortalité (RMM) ;
  • Recueil de l’expérience patient avec des interviews et/ou des questionnaires pour améliorer des organisations ou des pratiques (consultation d’annonce, organisation de la sortie…) ;
  • Réalisation de la méthode Shadowing (cf. bibliographie) envers un patient.

REPÈRE 5 : Patient coordonnateur

Il coordonne et contribue aux projets en lien avec le partenariat patient ainsi qu’à la diffusion de la culture collaborative.

Il développe et anime un réseau de patients.

Prérequis :

  • Être dans une posture constructive, souhaiter s’investir pour autrui et avoir pris de la distance par rapport à sa maladie ;
  • En cas de recrutement, le patient coordonnateur répond à une fiche de poste, au même titre que tout autre salarié.

Exemples :

  • Co-impulsion de la culture de l’expérience patients et contribution à son développement auprès des professionnels de santé en construisant une relation de confiance ;
  • Recrutement et coordination des patients partenaires (formation/acculturation, animation des réunions, accompagnement dans le déploiement des projets dans l’établissement) ;
  • Identification et facilitation de la mise en œuvre des projets collaboratifs entre les patients partenaires et les professionnels de l’établissement (projet immobilier, refonte de documents d’informations, réflexions sur l’évolution du process de prise en charge…) ;
  • Co-réflexion continue sur l’évolution et la pérennisation du modèle mis en place, en collaboration avec la gouvernance ;
  • Vocation à impliquer les patients-partenaires dans les différents projets ;
  • En parallèle, participation directe à certains projets en tant que patient-ressource, patient-pair-aidant, patient-formateur et patient-évaluateur, selon son profil et les opportunités.

Expérience Patient et réflexion éthique

Objectifs

Prendre en compte l’Expérience Patient dans toutes ses dimensions (sociale, culturelle, relationnelle, spirituelle…), et aussi celle des aidants, représente, pour un système de santé, non seulement un véritable défi mais aussi une réelle opportunité d’amélioration et d’efficience. Dans ce cadre, l’implication des patients, aidants, professionnels de santé et des institutions soulève de telles interrogations et de telles attentes que la réflexion éthique ne peut être laissée de côté.
Cette fiche Repère a pour objectifs d’aborder la problématique de la réflexion éthique associée à la démarche de l’expérience patient et de recenser, sans prétention exhaustive, les différents points de vue des personnes concernées, ainsi que quelques repères bibliographiques.

Éléments clés

Si on se réfère aux items retenus par l’ANESM* (Agence Nationale de l’Évaluation et de la qualité des Établissements et Services sociaux et Médico-sociaux) sur le questionnement éthique dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux, la réflexion éthique concerne, à de nombreux égards, la mise en œuvre de l’Expérience Patient dans une institution.

*L’ANESM est intégrée, depuis avril 2018, à la Haute Autorité de Santé (HAS)

Préambule

La prise en compte de l’avis des patients, non seulement dans les soins, mais aussi dans l’organisation générale de ceux-ci, représente l’élément central de la mise en œuvre de la démocratie sanitaire évoquée maintenant depuis plusieurs années. L’expérience patient regroupe une variété de modalités et d’engagements : patient ressource, patient formateur, patient expert, auditeur voire ambassadeur (voir fiche Repère « Terminologie du partenariat patient »). Les anciens malades, les aidants et les associations occupent aussi un rôle fondamental dans cette démarche expérience patient qui peut se traduire, sur le terrain, par des actions de témoignages, d’accompagnement, d’éducation, de formation auprès des personnes malades, des professionnels de santé en activité ou en formation mais aussi par une participation à la gouvernance des institutions.

La constitution du Comité de Démocratie Sanitaire au sein de l’Institut National du Cancer (INCa), le rôle des Commissions Des Usagers (CDU) dans les établissements de santé attestent de ce mouvement. Les Centres de Lutte Contre le Cancer (CLCC) soutiennent, de longue date, ces initiatives et s’attèlent à aller au-delà de ces obligations pour s’engager dans la mise en œuvre de l’Expérience Patient (cf. Charte d’engagements Unicancer, 2019).

Contexte législatif & réglementaire

Panorama

La mise en œuvre de l’Expérience Patient va mobiliser de nombreux intervenants : patients, aidants, associations, professionnels de santé et gouvernance1. De cette situation innovante, disruptive à forte valeur humaine et conséquences organisationnelles potentielles naîtront très probablement des questionnements. L’approche et la réflexion éthique peuvent aider à entrevoir des éléments de réponses, d’attitudes et de cheminement vers des pratiques consenties, partagées et respectueuses des personnes impliquées2.3.4.

En pratique

Les soignants et les directions doivent savoir que l’Expérience Patient engage véritablement et peut amener à des bouleversements dans les attitudes, les relations, la gouvernance et l’organisation générale d’une institution. Une approche systémique de l’Expérience Patient est certainement à privilégier (cf. pitch UNICANCER sur le modèle déployé au Centre Henri Becquerel)5. Cette méthode d’analyse facilitera l’appréhension de cette démarche innovante que représente l’Expérience Patient avec son système complexe faisant intervenir de multiples intervenants (patients, aidants, soignants, gouvernance…) et générant de nouvelles pratiques et interactions humaines. Pour illustrer cela, soulevons la question de la réaction des soignants face à l’implication très forte du patient lui-même ou d’un patient partenaire dans l’organisation et la co-construction concrètes des soins. Quelle sera la posture des soignants confrontés à ce changement de paradigme visant aux décisions centrées, éclairées par, avec et sur la personne plutôt que sur la pathologie exclusive ? Un patient partenaire (ayant pourquoi pas un statut de patient salarié par l’institution pour son implication…) devient-il un collègue et membre de l’équipe soignante ?

L’analyse des motivations et du cheminement des patients partenaires représente aussi un élément fondamental pour la mise en œuvre de l’Expérience Patient car il ne s’agit pas d’occulter ni de minimiser les conséquences psychologiques et relationnelles que cet engagement peut entraîner pour le patient et son entourage.

La réflexion éthique pourra accompagner utilement la mise en œuvre de l’Expérience Patient tant les problématiques abordées peuvent être impactantes sur les patients et les soignants. La complexité de cette démarche, ses écueils et ses difficultés ne doivent cependant pas effrayer. Les retours d’expérience des équipes engagées et les données de la littérature témoignent de l’intérêt de l’Expérience Patient pour redonner du sens et de la valeur au métier de soignant et contribuer à l’efficience des soins6.7.8.

Le tableau ci-dessous reprend certains aspects de ces questionnements potentiels et chaque équipe pourra identifier ses problématiques spécifiques, forte de son histoire et de son écosystème relationnel et organisationnel.

Le tableau ci-dessous reprend certains aspects de ces questionnements potentiels et chaque équipe pourra identifier ses problématiques spécifiques, forte de son histoire et de son écosystème relationnel et organisationnel.

Points de questionnementEnjeux de l’Expérience PatientRéflexion éthique
Pratiques professionnellesPlace du patient dans ses soins et leur organisation générale.Aptitude aux changements de pratiques des soignants ?
Culture institutionnellePrise en compte effective des critiques, avis, apports, suggestions des patients sur l’organisation.Culture médico-administrative de l’évaluation et du changement ?
Analyse de situationVécu du patient et des aidants.Faut-il (vraiment) revenir sur un vécu possiblement douloureux ? Comment transcender l’individuel au profit du collectif ?
Prise de décisionIntégration de l’avis du patient.Comment passer de la position de « sachant » à celle « d’écoutant » ? Comment passer du statut de patient à celui de co-acteur de son parcours de soins ?
Analyse post-décisionnelleAdaptation et modification de l’organisation des soins.Quel est le vécu du patient quant à son implication dans l’Expérience Patient ?
Liens de confiance entre soignants et patients-partenairesIdentification, formation des patients (ressource, pair-aidant, formateur, évaluateur…)La maladie est-elle un métier ?
Ressources humainesImplications des soignants et de la direction
Gouvernance
Quelle formation pour les soignants ?
Implication (temps, moyens…)Formation des patients/aidants : rôle et moyens.Patient partenaire : bénévolat ou salariat dans une institution ?
Quelle reconnaissance institutionnelle à l’Expérience Patient et ses acteurs patients/aidants ?
Qualité de vie au travail Réponse aux besoins des patients.En quoi l’expérience patient peut-elle contribuer à renforcer le sens au travail des soignants ?
Recherche clinique (RC)Intégration de l’Expérience Patient dans les sociétés savantes et l’élaboration des protocoles de RC.Prise en compte de l’avis des patients et adaptation des protocoles.

Bibliographie

  • Carman KL, Dardess P, Maurer M, Sofaer S, Adams K, Bechtel C, Sweeney J. Patient and family engagement: a framework for understanding the elements and developing interventions and policies. Health Aff (Millwood). 2013 Feb;32(2):223-31
  • Montreuil M, Martineau JT, Racine E. Exploring Ethical Issues Related to Patient Engagement in Healthcare: Patient, Clinician and Researcher’s Perspectives. J Bioeth Inq. 2019 Jun;16(2):237-248
  • Williamson L. Patient and citizen participation in health: the need for improved ethical support. Am J Bioeth . 2014;14(6):4-16
    DeCamp M, Dukhanin V, Hebert LC, Himmelrich S, Feeser S, Berkowitz SA. Patients’ Views About Patient Engagement and Representation in Healthcare Governance. J Healthc Manag. 2019 Sep-Oct;64(5):332-346
  • Paty A. « Comment développer une approche globale de l’Expérience Patient ? ». Pitch UNICANCER : https://www.youtube.com/watch?v=cr2XlE9H0cM. 30 septembre 2022
  • Bombard Y, Baker GR, Orlando E, Fancott C, Bhatia P, Casalino S, Onate K, Denis JL, Pomey MP. Engaging patients to improve quality of care: a systematic review. Implement Sci. 2018 Jul 26;13(1):98
  • Pomey MP, Clavel N, Normandin L, Del Grande C, Philip Ghadiri D, Fernandez-McAuley I, Boivin A, Flora L, Janvier A, Karazivan P, Pelletier JF, Fernandez N, Paquette J, Dumez V. Assessing and promoting partnership between patients and health-care professionals: Co-construction of the CADICEE tool for patients and their relatives. Health Expect. 2021 Aug;24(4):1230-1241
  • Pomey MP, Lebel P, Clavel N, Morin É, Morin M, Neault C, Tétreault B, Ewalds Mulliez AP. Development of Patient-Inclusive Teams: Toward a Structured Methodology. Healthc Q. 2018 Dec;21(SP):38-44

Identification et recrutement des patients/aidants partenaires

Objectifs

Utiliser l’Expérience Patient comme levier de transformation du système de santé implique un engagement des professionnels de santé et des patients1. Identifier ceux capables de co-construction, voire de co-leadership, apparaît comme un incontournable dans la mise en œuvre de ce process.

Cette fiche propose des repères aux équipes soucieuses d’organiser l’identification de patients partenaires.

Nota :
Dans le cas de la Prise de Décision Partagée, tous profils de patients peuvent être intégrés, dès lors que le concept est opérationnel au sein de l’établissement. Il ne peut donc être question de recrutement dans ce type de partenariat patient.

1 Le terme « patient » est retenu par commodité. Il convient de noter qu’il comprend également les proches-aidants.

Éléments clés

Le patient partenaire, tel que défini dans la fiche sur la Terminologie du partenariat patient, participe à l’élaboration et/ou à la déclinaison de projets, en collaborant avec les professionnels de santé et/ou d’autres patients.

Plusieurs critères déterminent son implication dans les projets :

  • Son parcours de soins ;
  • Son profil personnel ;
  • Son expérience professionnelle ;
  • Ses motivations et sa disponibilité ;
  • Les besoins et priorités de l’établissement en matière d’expérience patient.

Le repérage et le recrutement des patients partenaires nécessitent donc de respecter certaines étapes.

Préambule

La phase d’identification et de recrutement des patients partenaires constitue un processus global visant à limiter bon nombre d’écueils, pouvant parfois être particulièrement délicats, tant pour le patient (cf. mise en danger psychologique, déception, frustration…) que pour l’établissement de santé (cf. fuite d’informations confidentielles, par exemple).

En matière de recrutement, il existe des tendances qui se succèdent au fil des ans, comme pour les modes vestimentaires. Les outils de communication, les techniques d’entretiens, la posture des parties prenantes (recruteurs et candidats) et, plus généralement la culture de la relation au travail, sont soumis à ces évolutions et doivent donc être adaptés au fur et à mesure, pour optimiser les recrutements.

Dans le cadre de l’Expérience Patient, le recrutement/l’inclusion de bénévoles peut largement s’inspirer des techniques de sélection de candidats salariés mais avec des spécificités qui imposent une flexibilité encore plus grande, tant dans le processus de recrutement que dans la posture du recruteur.

En tout état de cause, il convient de mettre en œuvre des stratégies à court, moyen et long termes.

Les éléments et méthodes présentés ci-après tiennent compte de cette approche.

Panorama

REPÈRE 1 : un projet, une équipe

La nature du projet détermine les besoins en ressources humaines tant au niveau des professionnels de santé que du/des patient(s) partenaire(s). Chacun apporte son expérience et/ou son expertise.

REPÈRE 2 : l’identification des patients partenaires

Comment reconnaître un potentiel patient partenaire ?

REPÈRE 3 : les canaux de recrutement

Les connaître, les utiliser efficacement.

REPÈRE 4 : les premiers échanges par mail et téléphone

Les premiers échanges par mail et téléphone sont complémentaires et contribuent pleinement à évaluer le candidat. Ils sont donc une étape essentielle dans le processus de recrutement.

REPÈRE 5 : l’entretien en présentiel (ou en visio)

Cet entretien s’inscrit dans la continuité des précédents échanges qui se sont déroulés par mail et téléphone. Il vise à reprendre et à approfondir les éléments antérieurement abordés.

Il permet également de répondre aux questions du candidat et, in fine, de valider ou non l’intérêt et la faisabilité de la collaboration.

REPÈRE 6 : le contrat d’engagement et le périmètre d’activités

REPÈRE 7 : la gestion des refus de candidatures

CONCLUSION

En pratique

REPÈRE 1 : un projet, une équipe

La nature du projet détermine les besoins en ressources humaines tant au niveau des professionnels de santé que du/des patient(s) partenaire(s). Chacun apporte son expérience et/ou son expertise.

L’équipe de professionnels de santé doit présenter la volonté de coopérer, de collaborer, de co-construire avec un ou plusieurs patients, dès le début du projet/de l’action. Idéalement, une personne ayant déjà de l’expérience dans le partenariat-patient pourra fluidifier le lancement du projet (cf. participation directe et/ou formation/sensibilisation des membres du groupe projet).

Le patient partenaire doit présenter la volonté de s’impliquer dans la démarche d’amélioration continue au niveau des soins, de l’organisation de parcours de soins ou encore de l’organisation institutionnelle.

Afin de faciliter la posture du patient partenaire, il est souhaitable d’éviter le cumul des formes d’implication. Ainsi, le patient partenaire n’est pas un représentant des usagers et il n’est pas, sauf exception, un représentant d’association de patients. En cas d’appartenance à une association, il est clairement spécifié que la participation du patient partenaire l’est à titre individuel.

Le patient partenaire est à considérer comme un membre de l’équipe, qu’il intègre pour co-construire, co-mener, co-gérer des réflexions et des actions, en complémentarité des professionnels de santé, dans l’établissement.

Il collabore, au sein de l’équipe projet :

  • En partageant son expérience de vie avec la maladie ;
  • En apportant un regard sur une réalité/un ressenti, sur un quotidien spécifique ;
  • En soumettant ses idées et/ou des axes d’amélioration.

REPÈRE 2 : l’identification des patients partenaires

Plusieurs critères permettent d’identifier un potentiel patient partenaire :

  • Il a été/est concerné par un cancer et a acquis une expérience significative de la vie avec la maladie ;
  • Il présente un état de santé stabilisé au moment du recrutement (il n’est pas en phase aiguë de traitement ni de crise) ;
  • Il est capable de se distancier de sa propre expérience de vie avec la maladie ; une attention toute particulière est à porter à ce critère afin d’éviter de mettre le patient candidat dans une situation psychologique inconfortable, voire déstabilisante.
  • Il a un regard critique et objectif par rapport à son parcours de soins ;
  • Il est constructif dans ses réflexions ;Il exprime une volonté de contribuer à un objectif qui dépasse sa propre situation de santé ;
  • Il manifeste un désir d’implication auprès d’autres patients ou auprès de soignants ;
  • Il s’exprime clairement et possède des habiletés à travailler en équipe ;
  • Il fait preuve de patience et respecte le rythme d’autrui ainsi que celui des dispositifs dans lesquels il s’implique ;
  • Il peut accorder suffisamment de son temps libre en tant que bénévole.

S’il s’agit d’un aidant, les critères sont sensiblement identiques, à l’exception de l’état de santé, qui doit correspondre à celui du proche accompagné.

L’aidant partenaire peut également être intégré dans des projets, après le décès d’un proche, dès lors que son implication n’engendre pas de difficulté psychologique particulière.

REPÈRE 3 : Les canaux de recrutement des patients partenaires

D’une manière générale, il convient de combiner les différents canaux et d’exploiter, notamment, les réseaux relationnels des professionnels de santé et des usagers de l’établissement.

  • Sur le même principe que l’inclusion dans des essais cliniques, le repérage des profils peut se faire par les professionnels de santé mais le sujet n’est abordé que tardivement dans le parcours ; l’inclusion n’étant conseillée qu’en fin ou après le parcours de soins afin d’éviter que le patient ne soit en phase aiguë de traitement.
    Nota : lorsque que les coordonnées de la personne à contacter en interne sont transmises au patient candidat mais que celui-ci ne donne pas suite, il peut être judicieux de le relancer une fois mais il convient de ne pas insister et de respecter le choix du patient s’il a changé d’avis, sans qu’il n’ait à se justifier.
  • L’affichage d’une annonce dans des lieux stratégiques, à l’intérieur des bâtiments, peut se faire ponctuellement pour des projets spécifiques ou en continu, notamment lorsque l’établissement rencontre des difficultés à recueillir des candidatures.

Cooptation de patients

Les patients déjà intégrés dans le processus cooptent d’autres patients.

Réseaux sociaux – LinkedIn et Facebook

  • La production régulière de contenu sur des actions en lien avec l’Expérience Patient (sous réserve de la confidentialité et de la législation inhérente au secteur d’activité) permet, entre autres, à des patients/anciens patients de se familiariser avec le concept. Ceux qui s’y intéressent suivront les actualités et se manifesteront d’eux-mêmes, par une candidature spontanée.
  • La diffusion d’une annonce dans laquelle le projet est présenté dans les grandes lignes, avec indication d’un contact pour plus de renseignements, correspond à la même méthode que l’affichage en interne. Seul le canal de diffusion diffère.

Des annonces sur le site Internet de l’établissement peuvent venir compléter la diffusion sur les réseaux sociaux (pages professionnelles/institutionnelles).

Salons, congrès, colloques, journées d’étude…

La participation à ce type de manifestations permet de faire connaître les projets, leurs avancées et de contribuer à faire évoluer les mentalités sur l’Expérience Patient. Certaines candidatures directes, ou par le bouche-à-oreille, peuvent remonter grâce à ce travail de fond, bénéfice secondaire à ne pas négliger.

Publications dans la presse locale

Au même titre que les réseaux sociaux, une communication régulière dans la presse locale contribue à faire connaître l’établissement et ses actions. La presse constitue alors un vecteur de communication supplémentaire qui peut servir de levier pour la diffusion d’annonces ponctuelles.

REPÈRE 4 : Les premiers échanges par mail et téléphone

Les premiers échanges par mail et téléphone sont complémentaires et contribuent pleinement à évaluer le candidat. Ils sont donc une étape essentielle dans le processus de recrutement.

Les échanges s’établissent entre le futur patient partenaire et un professionnel de l’établissement, expérimenté en recrutement. Il peut s’agir d’un patient coordonnateur s’il y en a un dans le Centre (cf. Fiche Repère « Terminologie du partenariat patient »).

Ces échanges permettent notamment :

  • De présenter/rappeler le concept d’Expérience Patient ;
  • D’énoncer les grandes lignes du projet, d’informer, de préciser le cadre de l’éventuelle collaboration ;
  • D’évaluer le rapport à la maladie, notamment en analysant le récit du parcours de soins (cf. capacité à relater rapidement son expérience de vie avec la maladie et les traitements, émotivité éventuelle/recul) ;
  • De recueillir les principales motivations et le potentiel du candidat pour contribuer au développement de pratiques collaboratives professionnels de santé/patients ;
  • De s’assurer d’une disponibilité adaptée à la mission de bénévolat (ni trop, ni trop peu).

L’échange par mail a la particularité de permettre l’évaluation des capacités rédactionnelles (qui peuvent s’avérer utiles selon les projets) et de respecter le temps de réflexion du patient.

Il convient de retenir que lors de l’entretien téléphonique, le recruteur doit favoriser la mise en confiance du candidat et veiller à le rassurer sur le contenu et la forme de l’entretien en face à face, qui se veut détendu et le plus équilibré possible en matière de posture.

REPÈRE 5 : l’entretien en présentiel (ou en visio)

Cet entretien s’inscrit dans la continuité des précédents échanges qui se sont déroulés par mail et téléphone. Il vise à reprendre et à approfondir les éléments antérieurement abordés.
Il permet également de répondre aux questions du candidat et, in fine, de valider ou non l’intérêt et la faisabilité d’un partenariat.

ÉLÉMENTS À REPÉRER :

Savoir-être

  • Recul suffisant sur le parcours de soins et par rapport au cancer en général (cf. gestion des émotions) ;
  • Objectivité. Le candidat doit pouvoir formuler des remarques constructives qui dépassent l’intérêt individuel au service du collectif. Il ne doit pas chercher dans le partenariat-patient un moyen d’extérioriser une rancœur, une colère, une insatisfaction lui faisant perdre son objectivité.
  • Flexibilité intellectuelle et, notamment, capacité d’adaptation aux changements ;
  • Gestion du temps dans son engagement en tant que bénévole (ni trop, ni trop peu) ;
  • Sensibilité à l’humain, empathie, altruisme ;
  • Curiosité intellectuelle (cf. volonté de comprendre et d’apprendre) ;
  • Souci de la confidentialité ;
  • Propension à l’optimisme et l’ouverture d’esprit.

Savoir-faire

  • Capacité à s’exprimer en français (écrit et/ou oral, selon les projets) et notamment, à relater son parcours de soins de manière claire et synthétique ;
  • Facilités dans la communication interpersonnelle ;
  • Capacité à travailler en équipe et en mode projet ;
  • Capacité d’analyse des expériences vécues en lien avec la maladie ;
  • Connaissance des outils bureautiques (téléphone, messagerie, agenda, visioconférence) ;
  • Connaissance des dispositifs de soins présents au sein de l’établissement (apprentissage possible) ;
  • Toutes compétences transversales issues du parcours professionnel ou extra-professionnel du patient ;
  • Toutes compétences ou connaissances spécifiques pouvant apporter une valeur ajoutée aux projets dans lesquels le patient partenaire sera impliqué (exemple : handicap).

Motivations

  • Volonté de contribuer à la démarche d’amélioration continue de l’établissement.
  • Enthousiasme adapté. Il arrive que certains patients montrent un enthousiasme apparaissant comme débordant. Il convient alors de différencier une personne expressive et démonstratrice mais adoptant une posture adaptée par rapport au partenariat-patient, d’une personne ayant tendance à surinvestir le projet par manque de prise de recul. Faire parler le candidat sur ses autres centres d’intérêt est souvent un bon indicateur de comparaison ;
  • Sincérité. Le candidat ne doit pas s’inscrire dans une démarche commerciale (par exemple, utiliser un projet en interne pour développer une activité lucrative, extérieure à l’établissement) ;

Réunir l’ensemble de ces critères n’est pas impératif mais une majorité est nécessaire. Dresser un état des lieux permet de mieux cerner :

  • Les motivations profondes, certaines évoquées étant rédhibitoires ;
  • Les savoirs et savoir-faire acquis et/ou à acquérir éventuellement ;
  • Les savoir-être du candidat, dont une partie sont une condition sine qua none à la réussite du déploiement du partenariat-patient.

FORME DE L’ENTRETIEN

Il est essentiel d’avoir à l’esprit que :

  • Le candidat vient en entretien avec une possible appréhension. D’une part, il peut aisément faire un parallèle, conscient ou inconscient, avec un entretien d’embauche, source de stress. D’autre part, l’image qu’il a des professionnels de l’établissement dans lequel il a été pris en charge, peut l’impressionner. Il est donc indispensable de bien insister par téléphone, en amont, pour réduire ces biais. Et il peut s’avérer nécessaire de rassurer de nouveau, lors de l’entrevue ;
  • Les recrutements à plusieurs, s’ils permettent de croiser les avis, peuvent renforcer ces appréhensions et s’avérer alors contre-productifs, notamment dans le cas de l’inclusion de bénévoles. Si ce type d’entretien est malgré tout pratiqué, il conviendra d’en informer le candidat en amont et de le rassurer encore davantage que pour un entretien de futur salarié ; cela, afin de favoriser un climat détendu et propice à des échanges équilibrés entre les parties prenantes.

Préconisations :

  • L’apparence informelle de l’entretien et la transparence sont à privilégier pour favoriser l’aisance du candidat, sans pour autant oublier l’objectif de l’entrevue. L’ordre des questions est donc flexible et il est souhaitable de les insérer dans les échanges, au fur et à mesure, afin de créer des conditions de discussion plutôt que d’entretiens.
  • Le vocabulaire doit être simple et compréhensible pour un novice (cf : abréviations, termes techniques, etc.) ou expliqué.

DÉROULÉ DE L’ENTRETIEN

  • Inviter le candidat à s’installer et le remercier de sa présence et de son intérêt ;
  • Se (re)présenter et présenter brièvement son profil et ses missions ;
  • Rappeler l’objectif de l’entretien  comparer les attentes et motivations du candidat aux attentes et besoins de l’établissement pour le projet afin de s’assurer de l’adéquation des attentes des parties prenantes ;
  • Rappeler les exigences/particularités d’une collaboration bénévole à ce type de projets pour préparer un éventuel refus mais insister sur le fait que cela ne remet pas en question le profil du candidat ;
  • Donner la parole au candidat. Afin de limiter les biais dans ses réponses, il convient de le laisser parler de son parcours (professionnel et de soins), de son expérience et de ses motivations avant d’entrer dans le détail des attentes de l’établissement (certains candidats peuvent, en effet, être tentés de modifier leur discours afin de le faire correspondre à ces attentes, au lieu d’exprimer réellement ce qu’ils souhaitent) ;
  • Si le profil semble correspondre, entrer dans le détail des missions et du type de collaboration envisageable ;
  • Échanger avec le candidat afin de confirmer l’intérêt d’intégrer le projet ;
  • Aborder les modalités pratiques de la collaboration en insistant sur la confidentialité et la signature d’une charte d’engagement ;
  • Conclure en remerciant et en confirmant la satisfaction de l’établissement à accueillir le patient dans ses pratiques, puis aborder l’étape suivante.

Dans l’éventualité où le recruteur considère que le profil du candidat au bénévolat ne peut convenir, il conviendra d’éviter de présenter les détails de la mission, notamment pour limiter la frustration et préparer le refus. En revanche, le recruteur fera part de sa décision au candidat.

REPÈRE 6 : Le contrat d’engagement et le périmètre d’activités

Il s’agit d’un contrat d’engagement au bénévolat comprenant, a minima, l’engagement de l’établissement, l’engagement du patient partenaire, les règles d’éthique et de confidentialité.

L’entreposage et la gestion des données personnelles des patients partenaires bénévoles répond aux mêmes exigences de confidentialité que pour des professionnels de l’établissement.

REPÈRE 7 : Gestion des refus de candidature

L’annonce d’une réponse négative à une candidature est toujours délicate. Elle l’est d’autant plus lorsqu’il s’agit de bénévolat. Il est donc primordial de soigner cette dernière étape, en faisant preuve de diplomatie et de bienveillance, tant pour le candidat que pour le professionnel ou encore pour l’image de l’établissement.

Dans l’idéal, on peut amener le candidat à prendre conscience, de lui-même, que le projet ne lui correspond pas, d’où l’intérêt de ne pas trop développer le contenu et les attentes de l’établissement avant qu’il n’ait exposé ses propres attentes et ses motivations. Dans le cas contraire, il sera nécessaire de l’en informer, avec délicatesse.

Dans un cas, comme dans l’autre, il est conseillé de proposer au candidat un axe différent de collaboration (association de patients, représentant d’usagers…), une autre forme de participation ou d’engagement à la vie de l’établissement, auprès d’institutions mobilisant la démocratie en santé ou dans la société civile ; cela, afin qu’il tire un bénéfice de cet entretien.

Le refus d’une candidature peut intervenir à tout moment dans le processus de recrutement. Quelle que soit l’étape, il convient de prendre le temps d’échanger de vive voix avec le candidat pour l’informer de la décision prise.

Nota :
Il existe des similitudes entre le recrutement de patients partenaires bénévoles et le recrutement de patients partenaires salariés, parmi lesquelles on relève :

  • Les canaux d’identification et de recherche de profils ;
  • Les savoirs, savoir-faire et savoir-être recherchés ;
  • Le processus de recrutement, jusqu’à la contractualisation, qui diffère.
  • Les droits et devoirs vis à vis de l’employeur.

Pour le recrutement de salariés, les principales différences résident essentiellement dans :

  • La conclusion du processus de recrutement, qui passe par le service des ressources humaines ;
  • Une fiche de poste, au même titre que n’importe quel autre salarié ;
  • Les droits et devoirs vis à vis de l’employeur.

Conclusion

La validation du recrutement doit être suivie d’une phase d’intégration qui pourra comprendre une ou plusieurs formations du patient partenaire.
Cette phase doit, a minima, lui permettre de comprendre l’environnement dans lequel il est accueilli (cf. composition de l’équipe projet, fonctionnement du service, interactions avec les autres services, etc.).

Une attention particulière doit être portée au vocabulaire utilisé en milieu hospitalier, qui peut avoir une signification différente dans d’autres secteurs d’activité, créant ainsi des quiproquos. Le détail des acronymes fréquemment utilisés doit également être donné (exemples : CLCC, IDE, IDEL, IBODE, CDU… autant d’évidences pour les professionnels de santé, qui ne le sont pas pour les patients issus d’un secteur d’activité différent).

Selon le type de partenariat patient (cf. Fiche repère « Terminologie du partenariat-patient »), certaines formations, notamment certifiantes, peuvent être exigées pour le projet (exemple : formations à l’éducation thérapeutique).

Cette phase d’intégration/formation est tout aussi essentielle à la réussite des projets collaboratifs. Il conviendra donc de la traiter avec autant d’attention que les étapes présentées dans cette fiche.

Selon le type de partenariat patient (cf. Fiche repère « Terminologie du partenariat-patient« ), certaines formations, notamment certifiantes, peuvent être exigées pour le projet (exemple : formations à l’éducation thérapeutique). Cette phase d’intégration/formation est tout aussi essentielle à la réussite des projets collaboratifs. Il conviendra donc de la traiter avec autant d’attention que les étapes présentées dans cette fiche.

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