Dans une étude collaborative récemment publiée dans « European Journal Of Cancer », Marc Rodwin, Professeur de Droit à Suffolk University (Etats-Unis), et résident de l’Institut d’études avancées d’Aix-Marseille université (IMéRA, AMU) 2017-2018, Patricia Marino (Chercheur IPC, SESSTIM, AMu, Inserm, IRD) et leurs collègues reviennent sur l’explosion des prix des médicaments anticancéreux. Conduite à l’Institut Paoli-Calmettes (IPC), cette étude a analysé les relations entre prix et bénéfice thérapeutique des nouveaux médicaments anticancéreux en France sur les 13 dernières années.

Utilisant à la fois l’échelle de magnitude du bénéfice clinique (MCBS) de l’ESMO (European Society for Medical Oncology) et le score d’amélioration du service médical rendu (ASMR) de la Haute Autorité de Santé, largement employé par le Comité Economique des Produits de Santé (CEPS) pour la fixation des prix des médicaments, l’équipe dirigée par Marc Rodwin et Patricia Marino met en évidence une corrélation modeste entre le prix des médicaments et le bénéfice thérapeutique obtenu selon ces deux critères.
De façon surprenante, l’étude démontre qu’une grande partie des nouveaux médicaments examinés n’apportent que des bénéfices marginaux.

De plus, en calculant les augmentations de prix associées aux nouveaux traitements en comparaison avec des traitements plus anciens, ils montrent qu’il n’existe aucune corrélation significative avec la valeur ajoutée thérapeutique en termes d’efficacité et/ou de qualité de vie. Ainsi, même des médicaments n’induisant que de faibles améliorations des résultats médicaux voient leur prix s’envoler.

Pour les auteurs, les autorités politiques devraient s’interroger sur la légitimité des prix fixés au regard des bénéfices thérapeutiques obtenus et identifier de nouvelles approches pour s’assurer que les prix reflètent réellement la valeur médicale des nouveaux traitements anticancéreux.

Les obstacles à surmonter incluent le prix unique de médicaments dans des indications multiples, pour lesquelles le bénéfice clinique peut être très différent, les données issues d’études cliniques parfois biaisées, les remises secrètes négociées entre les compagnies pharmaceutiques et le comité de fixation des prix qui induisent un manque de transparence sur les prix réellement pratiqués et limitent ainsi les stratégies de coopération gouvernementale.

Pour le Professeur Anthony Gonçalves, Chef du Département d’Oncologie Médicale à l’PC et l’un des chercheurs et auteurs « il s’agit d’une question brûlante car l’augmentation explosive du prix des médicaments du cancer exerce une pression croissante sur l’équilibre de notre système de sécurité sociale et va finir par menacer l’accès de chacun aux vraies innovations thérapeutiques. De nouvelles règles permettant d’établir des prix justes et équitables sont à examiner ».

Référence :

Rodwin MA, Mancini J, Duran S, Jalbert AC, Viens P, Maraninchi D, Gonçalves A, Marino P. The use of ‘added benefit’ to determine the price of new anti-cancer drugs in France, 2004-2017. Eur J Cancer. 2021 Jan 4;145:11-18. doi: 10.1016/j.ejca.2020.11.031. Epub ahead of print. PMID: 33412466.
https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S095980492031368X?dgcid=coauthor
https://authors.elsevier.com/c/1cMEA_Lqip8WM (lien gratuit pour 30 jours)